Réutilisation & Production
Les systèmes sanitaires circulaires permettent d'utiliser les ressources des eaux usées. Celles-ci contiennent des nutriments, des matières organiques, de l'énergie et, bien sûr, de l'eau - sauf s'il s'agit de toilettes sèches. L'eau recyclée peut être utilisée localement pour l'irrigation ou comme eau à usage industriel et s'avère particulièrement utile pour l'entretien des espaces verts ou l'agriculture. Toutefois, l'agriculture peut également tirer un grand profit des nutriments contenus dans les eaux usées : l'apport ciblé de nutriments sous forme d'engrais permet de boucler les cycles et de réduire la dépendance aux engrais importés.
Nutriments précieux
Les nutriments tels que l'azote, le phosphore ou le potassium sont indispensables à la croissance des plantes cultivées et constituent un composant élémentaire des engrais. En Suisse, les engrais minéraux sont importés à 100 % : environ 45'800 tonnes d'azote et 4200 tonnes de phosphore par an [1] ! La production d'engrais est problématique et a un impact significatif sur notre environnement. Alors que la production d'azote synthétique est responsable d'un pour cent de la consommation mondiale d'énergie [2], le phosphore est en revanche une ressource limitée qui est extraite de sources critiques à grand renfort d'énergie [3]. En outre, les roches phosphorées sont de plus en plus souvent contaminées par du cadmium ou de l'uranium [4].
Le problème avec le tout-à-l’égout
Les nutriments et la matière organique contenus dans nos excréments sont actuellement dilués avec les eaux usées, transportés vers la station d'épuration via le tout-à-l’égout et mélangés à la pollution industrielle et aux eaux de chaussée. En raison de la dilution, la récupération des nutriments et l'élimination des polluants demandent beaucoup d'énergie. Alors que la majeure partie de l'azote s'échappe dans l'atmosphère sans être utilisée, le phosphore est fixé dans les boues d'épuration. Les boues d'épuration présentent différents risques pour l'environnement et la santé (métaux lourds, micropolluants), raison pour laquelle leur utilisation agricole est interdite dans toute la Suisse depuis 2006 (RO 2003 940, A 2.6 ch. 2.1 al. 3 ORRChim ; RS 814.81). Aujourd'hui, les boues d'épuration sont fermentées (production de biogaz), puis séchées et incinérées. À partir de 2026, le phosphore devra être récupéré à partir des cendres et valorisé sous forme de matière (art. 51 OLED, art. 15 OLED). De plus, malgré les stations d'épuration, 1000 t de phosphore [4] et de polluants sont encore rejetées dans les eaux avec les eaux usées traitées.
Économie circulaire avec les nutriments des eaux usées
Le recyclage local des nutriments permet de stabiliser l'équilibre écologique. De plus, la réduction des importations d'engrais en cas de pénurie d'engrais a un effet positif sur la sécurité d'approvisionnement. En fait, la population suisse produit par ses excréments 80% de l'azote et 110% du phosphore qui sont actuellement importés sous forme d'engrais minéraux [sources - infographie]. La composition de l'urine couvre particulièrement bien les besoins en nutriments des plantes. L'urine est surtout riche en azote et en potassium et contient également des traces de métaux comme le bore, le zinc et le fer. Les excréments contiennent des nutriments tels que le phosphore, le calcium et le magnésium et peuvent fournir une matière organique précieuse pour les sols [5, 6]. Ainsi, par exemple, le compost issu des excréments peut augmenter la fertilité du sol, stocker du CO2 et améliorer la capacité de rétention d’eau et de nutriments dans le sol.2
Étant donné que près d'un tiers des fermes suisses se trouvent dans des agglomérations [7], la récupération de nutriments et de matières organiques à partir de nos excréments et de l'eau des eaux usées par «urban mining» est particulièrement intéressante pour l'agriculture et contribue à une économie circulaire régionale durable. Toutefois, les excréments humains et les eaux usées domestiques présentent des risques graves pour la santé, notamment des agents pathogènes et des résidus de médicaments. C'est pourquoi un traitement approprié est essentiel pour éliminer les polluants et les agents pathogènes. Ainsi, la qualité de la ressource pourra être garantie [6, 8].
Engrais et autorisation
En raison de la valeur des nutriments et de la matière organique, les excréments humains devraient pouvoir être recyclés. Il existe différents procédés pour produire de tels engrais recyclés à partir d'urine, de fèces avec ou sans contenu urinaire, de contenus de toilettes sèches ou d'autres systèmes sanitaires d'un nouveau genre. Le but du traitement est d'éliminer les polluants et de désactiver les agents pathogènes. On obtient ainsi des engrais stables et stockables qui ne causent que peu de pertes environnementales par libération de gaz, infiltration ou érosion. Ils présentent en conséquence des avantages par rapport aux engrais habituels tels que les engrais minéraux ou le fumier animal. En Suisse, il n'existe pas encore de législation claire réglant la mise sur le marché de ces engrais recyclés. VaLoo s'engage activement pour la mise en place d'une législation appropriée. En 2018, Aurin®, un engrais liquide à base d'urine, a reçu sa première autorisation de mise sur le marché pour la fertilisation des cultures et des plantes ornementales.
Réutilisation de l'eau
Les eaux usées traitées peuvent également être utilisées pour l'irrigation, ce qui présente un grand potentiel, notamment en période de sécheresse persistante. La réutilisation de l'eau peut compléter la gestion des eaux pluviales et contribuer à faire de la ville une ville-éponge. Actuellement, il est toutefois prévu que les eaux usées produites doivent être raccordées au réseau d'égouts (GschG, Art. 11 WPA). L'eau épurée provenant de la station d'épuration contient encore en partie des nutriments et pourrait être utilisée pour l’irrigation. Selon la loi, l'écoulement doit toutefois être déversé dans un cours d'eau (GschV, Art. 6-9 WPO). Comme les cantons sont responsables de l'exécution, des exceptions peuvent être accordées (Equilibre, KREIShaus). Il est recommandé que les initiateurs du projet et le canton se mettent d'accord sur un suivi, ce qui permet de garantir la qualité.
Texte: Louise Carpentier
Édition: Dorothee Spuhler, Gina Marti
Literature
Nährstoffwende – Discussion paper and examplesP2Green (EU, since 2022) Closing the gap between fork and farm for circular nutrient flows
Ocapi (France, since 2015) Organisation des cycles Carbone, Azote, Phosphore dans les territoires
zirkulierBAR (Germany, since 2021) Nährstoffe aus verzehrten Lebensmitteln zurückgewinnen und diese im Sinne einer nachhaltigen regionalen Kreislaufwirtschaft wieder der Landwirtschaft zuführen
Prof. Dr. Morgenroth (2024), Wasserwiederverwendung Schweiz
van den Broek (2024), Opportunities and challenges of using human excreta-derived fertilizers in agriculture
Références
[2]: Patil, B. S., et al. “Plasma N2-Fixation: 1900–2014.” Catalysis Today, vol. 256, 2015, pp. 49–66, https://doi.org/10.1016/j.cattod.2015.05.005.[3]: SRF Treffpunkt (Audio) [4]: Binder C. R., de Baan L., Wittmer D. (2009); Phosphorflüsse in der Schweiz. Stand, Risiken und Handlungsoptionen. Abschlussbericht. Umwelt-Wissen Nr. 0928. Bundesamt für Umwelt, Bern. 161 S. https://www.infothek-biomasse.ch/images//203_2009_BAFU_Phosphorfluesse_in_der_Schweiz.pdf.
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